Nom de l’enfant : bouleversement à la Cour Européenne des droits de l’homme. Reviewed by Momizat on . Par Andrea Popescu, juriste internationale de l' Europeen  Center for Law and Justice. Dans les Etats membres du Conseil de l’Europe, les nouveau-nés pourront d Par Andrea Popescu, juriste internationale de l' Europeen  Center for Law and Justice. Dans les Etats membres du Conseil de l’Europe, les nouveau-nés pourront d Rating: 0
Vous êtes ici:Accueil » Genre » Idéologie du genre » Champ d'application » Nom de l’enfant : bouleversement à la Cour Européenne des droits de l’homme.

Nom de l’enfant : bouleversement à la Cour Européenne des droits de l’homme.

Par Andrea Popescu, juriste internationale de l’ Europeen  Center for Law and Justice.

Dans les Etats membres du Conseil de l’Europe, les nouveau-nés pourront désormais ne plus porter le nom de leur père si les parents en décident ainsi. La Cour européenne des droits de l’homme (ci-après « la CEDH ») justifie ce changement par le principe de non-discrimination et d’égalité entre l’homme et la femme. Mais la CEDH connaît-elle le véritable sens de l’attribution du nom du père à un enfant ?

Dans un arrêt du 7 janvier 2014, la Deuxième Section de la CEDH a condamné l’Italie pour n’avoir pas permis à un couple marié d’attribuer à leur fille le nom de la mère. Selon le droit italien, l’enfant devait porter le nom de son père. Néanmoins, le préfet de Milan, ville de résidence des requérants, avait permis aux parents d’ajouter le nom de la mère à leur enfant.

A l’exception du juge Popovic, les 6 autres juges de la Deuxième Section de la CEDH ont estimé qu’il y avait eu une discrimination déraisonnable et injustifiée dans l’exercice du droit au respect de la vie privée et familiale. Les juges ont également constaté qu’il y avait « une discrimination envers les femmes » (§ 67 in fine).

LA CEDH DÉVELOPPE UNE CONCEPTION FAUSSÉE DE L’ÉGALITÉ ET DE LA NON-DISCRIMINATION

« Puisque donner à un enfant le nom de l’époux est une reconnaissance symbolique et juridique de paternité et puisque l’identité de la mère est toujours certaine, quelle est la « discrimination fondée sur le sexe des parents » dont la CEDH fait mention (§ 67 de l’arrêt) ? »

L’arrêt Cusan et Fazzo c. Italie est un arrêt extra legem, car la CEDH a interprété la Convention à la lumière d’une conception faussée de l’égalité et de la non-discrimination. Au lieu de l’interpréter « de bonne foi suivant le sens ordinaire à attribuer aux termes du traité dans leur contexte et à la lumière de son objet et de son but »[1], elle l’interprète à la lumière d’une certaine forme de marxisme culturel où la non-discrimination signifie l’égalité absolue des droits. On passe de l’égalité devant la loi à une égalité absolue en droit, indistinctement de la situation objective de chacun. Ainsi, par un activisme judiciaire, la CEDH vide ces notions de leur sens traditionnel donné par l’expérience et l’histoire, en leur donnant un autre contenu.

Or, l’homme et la femme sont égaux en dignité mais différents et complémentaires. L’égalité ontologique n’implique pas l’égalité dans l’exercice de tous les droits, et la non-discrimination suppose qu’on ne traite pas différemment, sans une justification objective et raisonnable, des personnes se trouvant dans la même situation objective[2].

Le langage utilisé par la CEDH trahit donc son intention d’imposer une conception biaisée de l’égalité et de la non-discrimination qui est en totale rupture avec la tradition et les valeurs italiennes. En effet, la Deuxième Section de la CEDH, condamne clairement la « tradition », la « conception patriarcale de la famille » et le « principe bien enraciné dans la conscience sociale et dans l’histoire italienne » (§ 10), estimant que ce système par lequel on attribue à l’enfant le nom de l’époux est « excessivement rigide et discriminatoire envers les femmes » (§ 67).

POURQUOI ATTRIBUER A UN ENFANT LE NOM DU PÈRE ?

Qui plus est, la CEDH montre qu’elle connait mal la signification de l’attribution du nom de l’époux à l’enfant qui vient de naître. En effet, pourquoi attribue-t-on à un enfant le nom de l’époux et non de l’épouse, de ses grands-parents, de ses oncles ou de ses tantes, etc. ? Donner à un enfant à sa naissance le nom de l’époux, c’est reconnaître cet homme comme le père de l’enfant, car « pater est semper incertus, pater is est quem nuptiædemonstrant » (« le père est toujours incertain, celui-là est le père que le mariage désigne »). C’est aussi une manière symbolique pour la mère de donner l’enfant à son époux.

Pourquoi l’enfant ne prend-il pas le nom de l’épouse ? Il n’est pas nécessaire que l’enfant porte le nom de sa mère, car pour la femme qui lui donne naissance, le droit a prévu le principe « mater semper certa est » (« l’identité de la mère est toujours certaine », la mère de l’enfant est celle qui lui a donné naissance).

Puisque donner à un enfant le nom de l’époux est une reconnaissance symbolique et juridique de paternité et puisque l’identité de la mère est toujours certaine, quelle est la « discrimination fondée sur le sexe des parents » dont la CEDH fait mention (§ 67 de l’arrêt) ? Ne sont-ils pas tous les deux reconnus comme parents ayant les mêmes droits et les mêmes responsabilités envers leur enfant ? Concrètement, quelle est la discrimination subie par le requérant en tant qu’homme ? Quel droit de la femme a été violé ? Quels sont « les effets préjudiciables disproportionnés » (§ 64 de l’arrêt) pour la femme ? L’interdiction de nommer leur fille selon leur volonté ne touche-t-il pas les deux époux (homme et femme) de la même manière ? Maintenant que la femme pourra substituer son nom à celui de son époux, quel droit de la Convention est-il sauvegardé ? Aucun.

LA FAMILLE PATRIARCALE REMISE EN QUESTION

Dans la présente affaire, il ne s’agit pas de condamner une forme d’oppression subie par la femme mais plutôt de lui donner un nouveau pouvoir. L’obligation d’attribuer à l’enfant le nom du père est considérée ici par la CEDH comme une forme de domination de l’homme sur la femme, domination qui doit être abolie. Dans cet arrêt, le mariage et la famille patriarcale ne sont plus considérés comme une structure permettant de mieux protéger la femme et les enfants mais comme un moyen pour l’homme de prendre la première place. Peu importe que dans les faits, le constat de violation de la Cour n’accorde rien de plus à la femme que ce qu’elle a déjà. En revanche, la CEDH va priver les enfants de leur statut « d’enfant légitime », comme les tribunaux italiens l’ont constaté.

L’enjeu de cet arrêt dépasse le résultat de l’affaire en question, car les requérants ont refusé le compromis proposé par le préfet italien d’attribuer à leur fille leurs deux noms réunis. Ce qui est recherché dans cette affaire, c’est la transformation du rôle du droit et en particulier des droits de l’Homme. Dans cette affaire, le droit est moins un « instrument de protection de l’être humain »[3] contre l’agir arbitraire des autorités de l’Etat, qu’un nouveau pouvoir attribué à la femme.

Si cet arrêt n’a pas de conséquence en France car les parents peuvent ne pas attribuer à leur enfant le nom du père, il est troublant de constater que cette jurisprudence de la CEDH précède de quelques semaines la décision du législateur français d’éradiquer la notion de « soins d’un bon père de famille », notion et qui sera désormais remplacée par « soins raisonnables ».

[1]Article 31 § 1 de la Convention de Vienne sur le droit des traités de 1969 ;
[2]Gaset Dubois c. France, n° 25951/07, arrêt du 15 mars 2012, § 58 ;
[3]Loizidou c. Turquie, no 15318/89, (objections préliminaires), arrêt du 23 mars 1995, § 72.

 

Retour en haut de la page