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Yann Carrière. La théorie du genre : symptôme d’une société narcissique, manipulée et fascisante ?

 

Tribune libre de Yann Carrière* Paru sur NdF le 4 avril 2013
Étudier le genre (l’aspect social de l’identité sexuée) ou bien sa construction (le domaine de la théorie du genre) est une démarche en elle-même respectable. Les biologistes spécialistes des différences entre les hommes et les femmes sont les premiers à reconnaître l’existence et l’importance de ces aspects.
Mais, indépendamment de la respectabilité et du sérieux de l’objet de réflexion, la qualité scientifique de toute démarche d’étude sur le genre ou les genres est d’abord liée aux buts que l’on se fixe et aux méthodes que l’on utilise. Aussi, même si l’objet d’étude choisi (le genre), est un « concept construit » plus qu’une évidence naturelle, c’est donc avant tout de la rigueur intellectuelle et morale des tenants de l’approche que dépend la crédibilité de leurs recherches.
Et c’est là que, souvent, le bât blesse, notamment dans les développements les plus extrêmes utilisés par les militants de mouvements de libération (des femmes, des homosexuels…). Même si aujourd’hui, des hommes et des femmes essaient de mener des études plus équilibrées, bien qu’ils soient souvent amenés à donner des gages aux idéologies en place.
Mon propos est donc de montrer d’abord que la théorie du genre est certes une théorie au sens large du terme, mais qu’elle ne présente pas, loin s’en faut, les garanties habituellement associées aux démarches scientifiques. Parallèlement, nous verrons qu’il s’agit en fait d’une idéologie au service de politiques particulières. Enfin, au cours de cette exploration, les buts, méthodes et conséquences de ces politiques apparaîtront particulièrement mauvais voire singulièrement pervers.
Cependant, pointons la nécessité de prendre conscience que la théorie du genre, loin d’être une aberration de notre époque, en cristallise les pires déviations idéologiques. Si l’on souhaite lutter contre ces théories mauvaises pour la civilisation, il convient donc de procéder à l’examen de certaines orientations de la culture dominante occidentale déjà bien installées.
Mon premier contact avec la théorie du genre eut lieu lors d’une réunion amicale d’universitaires dans les années 90. On parlait à l’époque de la queer theory, dont la théorie du genre est un avatar. Je conversais avec un jeune militant homosexuel qui m’annonçait avec fierté : « Le sexe est une catégorie plus subjective qu’objective qui devrait pouvoir être modifiée sur la carte d’identité sur simple demande ». Notons que depuis l’idée a progressé : l’Argentine a même rendu légale cette possibilité en mai 2012.
Avec cette anecdote, le décor est planté sous plusieurs aspects.
« Nous n’avons pas affaire à des personnes ou démarches centrées sur le désir de connaître et d’explorer le réel, mais à une volonté politique de transformation de la société. Le mot et la volonté de subversion sont récurrents dans les textes de Judith Butler. »
D’abord le militantisme. Nous n’avons pas affaire à des personnes ou démarches centrées sur le désir de connaître et d’explorer le réel, mais à une volonté politique de transformation de la société. Le mot et la volonté de subversion sont récurrents dans les textes de Judith Butler.
Secondement le narcissisme. Aucun obstacle à mes désirs n’est entendable, (je peux être homme ou femme en fonction de mon vécu subjectif). Cette caractéristique générale de notre société a été bien explorée, aux États-Unis par Christopher Lasch, en France reprise et critiquée par Alain Ehrenberg. Les psychologues, psychothérapeutes et psychanalystes – entre autres professionnels des sciences humaines – ont depuis longtemps repéré cette émergence croissante du fonctionnement narcissique dans notre société. Ce dernier est notamment tous les jours encouragé par les publicités qui soulignent en permanence notre droit au bonheur et à la transgression : no limit ! Il est donc important de relever que la théorie du genre n’est nullement une aberration dans la vie intellectuelle contemporaine. Elle en incarne au contraire l’esprit. Aussi on ne peut la condamner comme une lubie superficielle.
En tout cas, pour des militants qui exigent d’être respectés et non discriminés même si leur manière d’être et notamment leur orientation sexuelle ne correspond pas à la norme (ce qui est louable), le meilleur moyen est encore de supprimer ces normes, de les détruire ou plutôt, on va le voir, de les déconstruire. Alors, la question d’une éventuelle souffrance liée à l’atteinte de l’image de soi et de sa dignité ne se pose même plus : ainsi, avec l’abolition du genre prescrit (homme ou femme), si les lesbiennes ne sont pas des femmes, comment pourrait-on encore ne serait-ce que s’étonner de leur conduite ou de leurs préférences ? C’est la fin assurée des risques de discriminations injustes.
Enfin et c’est peut-être le plus inquiétant, le déni du réel et de ses contraintes, général aux dérives narcissiques, s’applique ici à un objet bien particulier : la différence des sexes. Dans la culture psychanalytique, ce type de défense est typique du pervers. Malheureusement, nous allons le voir, il y a non seulement de la perversion mais aussi de la perversité dans cette démarche.
À ce stade de l’examen des buts poursuivis, on peut observer plusieurs rétrécissements importants de la portée de la théorie du genre : contrairement à ce que laisse entendre son intitulé, déjà partiellement mensonger donc, il ne s’agit pas d’explorer le genre en toute généralité. Tout d’abord, l’exploration se fait uniquement dans une perspective de rapports de pouvoir entre les genres. De plus, la recherche et la réflexion de la théorie du genre ne prennent jamais de recul par rapport à un dogme fondateur qui affirme que la différence des sexes et l’hétérosexualité s’accompagnent nécessairement de discrimination injuste. Enfin l’approche est délibérément et uniquement centrée sur le sens univoque des rapports de pouvoir et d’oppression liés à « l’hétérosexualité imposée » : c’est toujours dans le sens des hommes envers les femmes, des hétérosexuels envers les homosexuels, de la société envers les transgenres et jamais l’inverse. De ce point de vue, la théorie du genre est un continuateur du féminisme radical, qui postule le dogme absurde que ce sont toujours les hommes qui dominent ou ont le pouvoir sur les femmes.
En dehors de ce paradigme singulièrement restreint (au pouvoir d’une part et au pouvoir masculin d’autre part), la démarche de la théorie du genre est entièrement aveugle. C’est ce qui explique l’autisme de ses tenants dans le documentaire norvégien « The Norwegian Paradox » : un journaliste norvégien joue les candides sur les différences de comportement des sexes au travail et met en lumière le parti pris et l’obscurantisme des tenants de la théorie du genre. On y perçoit en particulier l’obsession de la théorie du genre pour les rapports de pouvoir à sens unique. De fait il y a rejet de toute autre approche des genres, et notamment des éléments sur les différences hommes femmes fournis par la biologie. Ce rejet a priori révèle un véritable esprit de croisade : comme le dit l’un des partisans interviewés, « notre rôle est de combattre ceux qui croient à la biologie » ; dont acte. Une croisade n’est pas une entreprise scientifique. Ici au contraire, elle combat les scientifiques : il s’agit donc d’obscurantisme.
L’objectif de la croisade, la psychanalyste Janine Chasseguet Smirgel le découvrait avec stupéfaction il y a quelques années : il s’agit de déconstruire (entendre détruire) l’hétérosexualité. Ce que cela révèle de haine est impressionnant. Haine de la nature, de la réalité (négation du sexe biologique), haine de l’autre en tant qu’hétérosexuel et spécialement comme homme hétérosexuel. La psychanalyste était frappée par l’agressivité de l’oratrice, recrutée sur les quotas de lesbiennes dans l’université américaine. Aujourd’hui il nous suffit d’apercevoir les Femen pour percevoir la noirceur haineuse de l’idéologie qui anime des mouvements prétendument féministes !
« Le déni du réel et de ses contraintes, général aux dérives narcissiques, s’applique ici à un objet bien particulier : la différence des sexes. Dans la culture psychanalytique, ce type de défense est typique du pervers. »
Jusque-là, le mal est déjà considérable. Il ne prêterait cependant pas tant à conséquence si les méthodes intellectuelles employées n’étaient aussi trompeuses que la vraie nature des buts de cette théorie.
Car une hypothèse même mal conçue peut être mise à l’épreuve de la réalité de façon scientifique et rigoureuse, ce qui révèle alors, avec un peu de chance, la qualité insuffisante de l’idée initiale et permet à la réflexion d’avancer. Encore faut-il admettre les canons habituels de la rigueur intellectuelle.
Or, ici comme dans nombre de recherches en sciences humaines inspirées d’idéologies politiquement correctes, les règles traditionnelles de sérieux et d’objectivité sont rejetées. Certains chercheurs militants en sciences humaines soulignent fréquemment que ces règles sont des inventions de l’homme blanc hétérosexuel du XVIIIe siècle et qu’à ce titre, elles ne concernent pas les autres catégories d’humains. Dans les gender studies en particulier, on demande même aux chercheurs de faire preuve d’originalité épistémologique, en offrant des approches et points de vue subjectifs.
Pourtant, l’édifice intellectuel souvent illisible et confus de la théorie du genre utilise une armature conceptuelle et des outils intéressants et dignes d’attention. Simplement, ils sont utilisés à sens unique et sans le contrôle d’instruments expérimentaux davantage garants de l’objectivité et de la valeur scientifique des idées avancées. Citons deux outils principaux : la généalogie et la déconstruction. Les deux se donnent pour tâche de décortiquer concepts (le sexe, le genre…) et pensées, tout en les démystifiant et donc en en atténuant la portée. Le premier se penche sur l’histoire de la construction du concept cible, alors que le second s’intéresse au contexte de son émergence (contexte socio-historique, anthropologique…).
Pour intéressantes qu’elles soient sur un plan exploratoire, pour la fabrication d’hypothèses ou de pistes de réflexion, ces démarches, déjà anciennes (cf. Nietzsche et Foucault pour l’une, Derrida pour l’autre), restent d’une pertinence limitée dans la constitution d’un savoir.
Le savoir au sens de la science s’appuie en effet in fine sur la confrontation des hypothèses au réel. On ne peut se contenter d’élaborations intellectuelles, aussi astucieuses soient-elles. D’où l’importance d’exposer ses thèses à l’expérimentation ou à tout autre dispositif de contrôle par la réalité (principe de falsifiabilité bien décrit par Karl Popper). Mais nous rejoignons là les positions honnies d’objectivation, typique de l’homme hétérosexuel blanc !
Ces approches sont enfin essentiellement destructrices, elles infirment plutôt qu’elles n’affirment. Au-delà de la notion d’objectivité, même la notion de sujet est remise en cause. On atteint là sans doute un extrême dans l’éloignement et la déconnexion du réel entamée il y a plusieurs siècles par Descartes, dans son « je pense donc je suis ». Il y voyait une certitude minimale, sans songer qu’un jour la notion de sujet elle-même pourrait être mise en doute…

L’ensemble constitué par ces buts militants voire haineux et ces méthodes de destruction intellectuelle à sens unique offre aux tenants de cette idéologie la possibilité de flotter indéfiniment dans un nirvana de considérations plaisantes mais déconnectées de la vie, parfois brillantes mais toujours inconclusives et même stériles, qui caractérise les écrits de Judith Butler, souvent illisibles pour le commun des mortels, et pour les personnes attachées au sens concret des choses.
Reconnaissons et admirons cependant une certaine habileté intellectuelle dans ces exercices gratuits de destruction. Cette habileté permet à Butler de passer à volonté d’un conditionnel prudent lorsqu’elle s’exprime sous forme d’hypothèses honorables en elles-mêmes, à des affirmations gratuites ou pétitions de principes plus révolutionnaires sans aucun argument. À l’inverse, ce flou lui permet de revenir en arrière lorsqu’on l’accuse de positions extrêmes, voire de dénoncer les militants naïfs ou les manipulateurs cyniques qui ont cru pouvoir utiliser ses propos. (cf. ses retours critiques dans les livres qui ont suivi Trouble dans le genre, ou dans certaines de ses interventions orales). Mais au-delà de l’aspect gratuit, c’est là qu’il convient de rappeler que ces idéologies et jeux brillants et parfois pervers peuvent avoir des conséquences désastreuses et cruelles lorsqu’ils font irruption dans la réalité, un peu à la manière des utopies communistes des siècles passés.
Car c’est la poursuite d’idéologies sous forme d’utopie violemment imposée au réel qui créée des dégâts. Du rêve d’un être humain nouveau, affranchi des limites de la sexuation, on passe aisément au forçage dans ce moule des personnes réelles, et c’est alors de la violence pure et malfaisante, qu’elle soit psychique ou physique.
On peut dès aujourd’hui déplorer l’absence de respect de la personnalité sexuée des enfants dans les écoles où l’on les « encourage » dans des activités inversées par rapport aux stéréotypes, un peu à la manière des rééducations culturelles de sinistre mémoire. Ce n’est pas une éducation unisexe à prétention neutre, ce qui serait sans doute défendable, mais un conditionnement violent et violant l’identité naturelle des enfants. C’est l’équivalent psychique de certaines expériences physiques, notamment de castration, qui peuvent avoir lieu au nom de la théorie du genre.
« C’est la poursuite d’idéologies sous forme d’utopie violemment imposée au réel qui créée des dégâts. »
Édifiante est à ce titre l’histoire de David Reimer, racontée par John Colapinto, survenue au tout début des applications de cette théorie sous l’égide d’un des tout premiers inventeurs du terme et de la théorie du genre, le professeur John Money, dans les années 60. À la suite d’une circoncision ratée, les organes génitaux d’un tout jeune garçon furent gravement endommagés. Face à la détresse des parents, le corps médical de l’époque leur expliqua qu’une solution consistait à lui ôter complètement l’appareil génital masculin et à l’élever comme une fille. Vu son jeune âge (moins de 2 ans), son identité de genre n’était pas construite, expliquait-on aux parents, et l’adaptation à sa nouvelle identité devait s’effectuer sans problème. Les parents y ont naturellement vu une issue préférable aux souffrances assurées qu’aurait eu à subir leur enfant dans son identité de garçon mutilé, et l’expérience fut tentée. Ce fut un fiasco, raconté dans le livre As Nature Made Him. Le garçon n’admit jamais le rôle de petite fille qu’on chercha à lui imposer et grandit dans la rébellion et la souffrance. Jeune adulte, il se fit opérer dans l’autre sens et se maria. Cette nouvelle vie ne fonctionna pas non plus et il finit par se suicider.
Un détail révèle la perversité intrinsèque de la démarche, c’est le mensonge qui entoura l’ensemble de l’expérience. Le professeur John Money proclamait en effet qu’elle était un succès complet, ouvrant ainsi la voie à la perpétuation d’autres drames cruels. Mensonge et violence malfaisante accompagnent ainsi infailliblement les entreprises de rage narcissique en révolte contre le réel lorsqu’elles échouent.
Et malheureusement, même si c’est à bas bruit, ces phénomènes perdurent et se répandent avec le succès de la théorie. Ils illustrent comment l’absence d’auto-restriction à la toute-puissance narcissique de l’humain produit nécessairement une tyrannie fascisante et cruelle. Et c’est cependant le chemin que prend résolument notre civilisation avec des décisions politiques qui endossent ces théories délirantes, comme la convention d’Istanbul du Conseil de l’Europe signée en 2011, qui prévoit d’éradiquer les stéréotypes de genre dans le cadre de la lutte contre le sexisme misogyne.
Pour illustrer ces dangers, je retiendrai quatre anecdotes tirée des media, toutes à propos d’enfants élevés par des couples de lesbiennes, fait plus courant, semble-t-il, que l’élevage par des parents gays ; et peut-être plus facilement toxique également, si l’on en croit l’étude du professeur Regnerus. En tout état de cause, l’investissement de la théorie du genre par des lesbiennes est patent, à commencer par la grande prêtresse Judith Butler. Dans la lignée du féminisme radical, à l’intersection des discriminations injustes qui ont pu frapper femmes et homosexuel(le)s, il est compréhensible de trouver des lesbiennes en première ligne, pour le pire comme pour le meilleur.
– Le premier cas gênant m’est apparu lors d’un reportage télévisé diffusé il y a déjà quelques années. On y voit une des deux mères lesbiennes répondre à une question de son fils, âgé d’environ 5 ans. « Où il est mon papa, à moi ? ». La mère lui répond qu’il n’en a pas, tout en se tournant en souriant vers le journaliste qui l’interviewe, sans se soucier davantage du désarroi de son fils, pourtant tout à fait perceptible. Mensonge et indifférence à la souffrance de sa progéniture, c’est déjà fort, mais ce n’est qu’un début.
– En second, citons le déni de réalité (ou sa relativisation, selon l’habileté de l’argumentation) de la différence des sexes, qui permet de nier l’importance du père et facilite la démarche de deux lesbiennes autrichiennes qui veulent exclure le père de tous droits dans l’élevage de son enfant (arrêt du 19 février 2013 de la Cour européenne des droits de l’homme).
« Le thème de la diversité, avec ses échos sentimentaux puissants (l’amour universel), est un outil rêvé pour manipuler les masses et « diviser pour régner », substituant une lutte des sexes/genres à la lutte de classes. »
– C’est clairement la théorie du genre qui facilite aussi l’entreprise de changement de sexe de leur garçon que deux lesbiennes poursuivent, au motif que c’est plus facile à faire avant l’âge adulte. Notons, il est vrai, que la difficulté du garçon englobé dans un environnement trop féminin peut d’elle-même conduire à des troubles de genre (cf. le psychanalyste Robert Jesse Stoller et les témoignages d’enfants élevés dans un tel contexte).
– Enfin, c’est un excès de narcissisme tout puissant qui a conduit une lesbienne à battre à mort le fils de sa compagne qui refusait de l’appeler papa (affaire Gendre Botha, Afrique du Sud). Comme beaucoup d’idéologies utopistes et déconnectées du réel, la mortifère théorie du genre tue.
Lorsqu’on lit ce qui précède, on se demande comment de tels mouvements d’idées réussissent à se propager en dépit de leurs évidentes failles et malfaisances. C’est peut-être l’occasion de prendre conscience qu’au-delà des services rendus à certains groupes réputés (à tort ou à raison) opprimés, il y a une autre explication à prendre en compte, et que les postures les plus perverses ne sont pas forcément celles que le l’on croit discerner de prime abord chez les idéologues.
Pour faire simple, le sociologue et théologien Jacques Ellul a montré combien la propagande était nécessaire au fonctionnement de nos sociétés. Manipuler les gens est la grande affaire du gouvernement invisible des démocraties, tant vanté par le publiciste Edward Bernays, double neveu et disciple de Freud. Or, de ce point de vue, les idéologies progressistes (« religion du progrès ») sont facilement récupérées et utilisées dans l’intérêt des puissants de ce monde.
Ainsi le thème de la diversité, avec ses échos sentimentaux puissants (l’amour universel), est un outil rêvé pour manipuler les masses et « diviser pour régner », substituant une lutte des sexes/genres à la lutte de classes (avec le but d’une société où le sexe/genre est aboli, comme autrefois la société sans classe). En témoigne notamment une confidence faite par Nick Rockefeller au metteur en scène Aaron Russo, rapportée par ce dernier : la libération des femmes, au-delà de son bien-fondé, fut encouragée dans la mesure où l’affaiblissement de la famille sert les intérêts du capitalisme de consommation : les enfants, moins éduqués et donc moins structurés, deviendraient de ce fait des adultes plus manipulables. Dans une telle perspective, une approche aussi destructrice de la personne humaine qu’est la théorie du genre constitue une véritable aubaine.
Pour des raisons techniques qu’avaient identifiées Jacques Ellul, notre société semble préférer la propagande mensongère à la vérité. L’évolution narcissique de la mentalité contemporaine offre à cette propagande un véritable boulevard. Mais il n’est jamais trop tard pour se réveiller. Le salut (du respect au bonheur en passant par la santé) des humains, hommes, femmes ou transgenres, est à ce prix.

*Yann Carrière est Docteur en Psychologie et membre du réseau Homme, Culture & Identité. Il a écrit Du sexisme au fascisme, lettres à un jeune père sur la misandrie contemporaine

Source http://www.ndf.fr/identite/04-04-2013/la-theorie-du-genre-symptome-dune-societe-narcissique-manipulee-et-fascisante-12#.UwfE7rCYYYw

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