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Février 2016 Femina Europa à l’Assemblée Nationale : Assises pour l’abolition universelle de la maternité de substitution (GPA).

Un colloque sur la GPA a réuni trois organisations « féministes ». Si les motivations sont différentes, le constat est le même:   la gestation pour autrui dévalorise la maternité en lui donnant un prix.

A l’Assemblée Nationale – Paris – Salle Bourbon le 2 février 2016

 

Florence Dumont, Député socialiste du Calvados, 1ère Vice-présidente de l’Assemblée, introduit le colloque: « Si l’homme a une dignité, il n’a pas de prix. Il doit être traité comme une fin et non comme un moyen », avant de donner la parole aux associations organisatrices :

– CADAC Coordinations des associations pour le droit à l’avortement et la contraception

– CLF Coordination lesbienne de France « Pas d’exploitation du corps des femmes »

– CORP Collectif pour le respect de la personne dont fait partie Sylviane Agacinski.

 

 

Pour Nora Tenenbaum, de la CADAC, il faut agir sur plusieurs aspects:

– Il n’y a pas de GPA ni de prostitution éthiques.GPA et prostitution ne sont pas des professions!

– Comprendre le problème des femmes stériles

– Lutter contre les lobbys de parents d’intention (commanditaires)

– Lutter contre les lobbys médicaux

– Les nouvelles technologies ne doivent pas aller contre les droits fondamentaux

 

Pour la CLF

« Nous sommes des femmes à part entières et fondamentalement opposées à l’exploitation du corps des femmes » Avec la GPA, il y a un détournement abusif de l’expression « disposer de son corps » qui avait pour objectif de lever la contrainte reproductive: ce n’est pas pour répondre aujourd’hui à des besoins individuels d’enfant! Le CLF est sorti en 2013 du Lobby LGBT sur des valeurs de justice sociale.

 

Pour Sylviane Agacinski, de la CORP

« C’est la plus formidable agression faite aux femmes depuis l’esclavage ». La philosophe n’a pas mâché ses mots: « le marché des ventres s’empare des femmes les plus pauvres; c’est un néo-colonialisme ». Elle a souligné la tendance forte des instances européennes à fermer les yeux sur le tourisme reproductif. Le collectif a adressé un document à ce sujet à la Conférence de La Haye : pas de réponse. La cour Européenne des droits de l’homme est indifférente aux droits des femmes et des enfants. Quant au conseil de l’Europe, elle a dénoncé la partialité de la commission, le conflit d’intérêt en cours et l’implication de P de Sutter dans un accord avec une entreprise indienne de GPA  » The seeds of innocence »

 

Table ronde 1  

  • Regula Stämpfli, Politologue suisse. Alors que les médias ont tendance à considérer que le sujet est du domaine privé, c’est bien du domaine public qu’il relève.

Regula Stämpfli dénonce « une appropriation du corps par l’économie ». Avec le développement des marchés financiers, on voit se développer la marchandisation et la commercialisation du corps humain. Ne parle t on pas de banque de sperme, de banque d’ovocytes? Le corps humain devient un « capital » à exploiter. Le corps devient du « cash » !

 

  • Geneviève Azam, Maître de conférence en économie à l’Université de Toulouse, écologiste et altermondialiste. La GPA est-elle éthique ? En autorisant des brevets qui portent sur le vivant, on a passé un cap éthique. On a redéfini le vivant comme un ensemble de pièces détachées ; il est donc devenu à ce titre privatisable et marchand. Au sommet de la terre à Rio en 1991, avec les meilleures intentions du monde, on emploie pour la première fois le terme « ressource biologique ». La naissance, acte inouï, tend à passer dans le registre de la fabrication. Ainsi, la procréation fait partie de l’économie de la vie. Il faut rompre avec l’éthique (on remplace entre autre « maternité » par « gestation »). L’utérus remplit un service corporel écosystémique : le pouvoir de reproduction. Afin de rationaliser l’acte, on le détache de la mère biologique et l’échange marchand peut être envisagé. Il n’y a plus de relation entre mère et enfant : une fois le service corporel rendu, la naissance est la séparation de l’utérus et du produit. La mère porteuse se confond avec le geste de reproduction; on « peut » alors faire abstraction de toute éthique.

Pour qu’un marché existe, il faut des règles ; adossé au droit à l’enfant, il y a logiquement le droit à un enfant de qualité. Pour y arriver tout doit être précisé dans le contrat. On met en œuvre ici une éthique purement instrumentale pour que le marché soit un échange juste, librement consenti : les parents reçoivent « un bien de qualité», la mère porteuse, l’argent.

 

  • Jean Daniel Rainhorn, Médecin, Professeur à Genève au Centre d’enseignement et de recherche en action humanitaire CERAH. Regard international.

Au regard du nombre de naissances dans le monde, la GPA ne représente pratiquement rien mais elle soulève cependant des débats importants. Pour ou contre ? Chacun brandit les droits de l’homme pour prouver le contraire. Les législations sont diverses, A Genève, on se demande si c’est une priorité. A part l’UE (17 décembre 2015), aucun organisme international n’a publié de texte sur le sujet. On se demande quelle forme de régulation mettre en place. Il y a beaucoup d’éléments communs avec les prélèvements d’organes. L’OMS souhaite trouver un cadre commun pour toutes ces questions. Dans certains pays, on commercialise le don en produits sanguins. Les donneurs, le plus souvent pauvres, sont un réservoir à qui on donne même quelquefois des globules rouges pour une meilleure efficacité. En procédant ainsi en Chine, on a transmis le VIH à 700 000 personnes. Concernant le don d’organes, il y a plus de demandeurs que d’organes disponibles. Néanmoins avec les guerres au Moyen-Orient, le prix du rein s’est effondré car la demande devient inférieure à l’offre. Les populations pauvres deviennent ainsi des réservoirs de sang et d’organes.

 

Réaction de Dominique Potier, député PS Meurthe et Moselle:

« La gauche est réveillée sur la question des limites. On est amené à faire une critique de la modernité »

Réaction du Docteur Noizet, gynécologue, spécialiste PMA:

N’oublions pas que la marchandisation du corps humain a commencé avec:

1) le don de sperme 2) le don d’ovocytes 3) la congélation des embryons

 

Table ronde 2

  • Kajsa Ekis Ekman Suédoise, journaliste. Auteur de: « L’être et la marchandise. Prostitution, maternité de substitution et dissociation de soi »

La GPA est la petite sœur de la prostitution, c’est une exploitation des riches par les pauvres. Dans la prostitution on a le sexe et pas l’enfant, dans la GPA c’est l’inverse. Dire qu’il faut développer une GPA altruiste, que ce serait la solution car dans ce cas il n’y a pas exploitation, c’est faux ; dans l’immense majorité des cas, on paie la femme. La GPA altruiste laisse des traces chez la mère d’après des études faites aux Etats Unis.

La prostitution donne une image sale de la femme; c’est la « pute » en        opposition avec l’image de la « Vierge » sous tendue par la GPA. La mère           porteuse, cela fait plus « clean ». Mais il y a en fait une plus grande réification du corps. Quand la prostituée essaie toujours de se dissocier de son corps dans l’acte de prostitution, il est demandé à la mère porteuse de se détacher de ce qu’elle porte dans son corps pendant 9 mois; et elle ne peut plus faire ce qu’elle veut de son corps pendant cette même période. Retour à une forme de droit patriarcal, de sacrifice consenti .. par altruisme ? Mais l’altruisme est un faux argument basé sur l’idée que si la femme n’est pas rémunérée, elle ne sera pas exploitée. Il y a aussi une forme de chantage: si les femmes d’Europe n’acceptent pas la GPA altruiste, on sera alors amené à exploiter des femmes dans les pays pauvres (Inde, .. ). Kajsa E Ekman a rappelé que les enfants ont droit à leur mère et une femme qui donne naissance à un enfant est mère.

 

  • Julie Bindel Anglaise et écrivain. Lesbienne très active, elle lutte contre la violence faite aux femmes; elle est contre le mariage homosexuel. Elle écrit dans le Guardian. Elle est allée en Inde et s’est fait passer pour un commanditaire auprès d’agences spécialisées ; elle raconte l’écart entre la vitrine et la réalité quand on fait un peu de recherches sérieuses sur place.

Sa conclusion: si on accepte la GPA, ce marché, même encadré, se renforcera.

 

  • René Frydman Médecin gynécologue, il a fait partie des fondateurs de médecins sans frontière, a participé à l’équipe qui avec J. Testard a donné naissance au premier bébé « éprouvette ». Actuellement à la retraite, il a auparavant développé le concept de « bébé médicament ». Il a été auditionné à Paris cet hiver par la commission des affaires sociales du Conseil de l’Europe sur le sujet de la GPA (Rapport de Sutter) et a pris clairement position contre la GPA. Nous avons dû partir avant son intervention. Dommage !

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