Un vent nouveau sur Bruxelles
Cinq membres de Femina Europa ont pu assister à l’ Audition Publique organisée par la Commission des droits de la Femme et de l’égalité des genres sur « la santé et les droits sexuels et reproductifs », le mardi 29 Janvier 2008.
L’alerte avait été donnée par NWFE (Nouvelles femmes pour l’Europe) qui nous avait fourni les accréditations nécessaires pour entrer au Parlement.
Cette audition était réclamée depuis longtemps par le Groupe Socialiste et, selon la règle, chaque groupe politique du Parlement avait invité un expert à s’exprimer sur ce sujet. L’enjeu était en effet de taille. Il s’agissait ni plus ni moins d’une tentative pour faire entrer en force le droit à l’avortement dans la zone des législations contraignantes.
En effet, depuis la conférence de l’ONU au Caire en 1994, le débat autour du thème « SANTE ET DROITS SEXUELS ET REPRODUCTIFS»* suscite toujours autant d’émotion et de mobilisation. Certains veulent inclure dans sa définition le droit à l’avortement, d’autres non. Or, dans les documents du Caire, il est bien précisé que « en aucun cas l’avortement ne sera promu comme une méthode de planning familial » et que « toute mesure concernant l’avortement ne peut être prise qu’au niveau de chaque pays ».
Il faut savoir que les conférences internationales de l’ONU ne sont pas des traités : leurs recommandations ne sont pas contraignantes pour chaque état. Une des stratégies du lobby féministe est de faire croire le contraire. Normalement donc, les choses sont claires, mais dans la réalité on observe que certains experts et fonctionnaires de l’ONU et des ONGs comme le Planning Familial, qui reçoivent chaque année de très importants budgets, appliquent une politique de promotion active et coercitive de l’avortement, qui est alors banalisé et assimilé à de la contraception spécialement dans des pays pauvres comme en Afrique par exemple ou en Haïti.
A l’occasion de cette audition, le LEF (lobby européen des femmes) qui soutient le Planning Familial n’a pas hésité à faire venir de nombreux militants dans une tentative de faire passer en force leurs idées une fois pour toutes.
Trois des cinq intervenants ont donc tenu un discours favorable au renforcement du Planning Familial et hostile aux droits des parents à élever leurs enfants. Discours caricatural des mouvements féministes et des lobbies LBGT (lesbiennes, bi, gays et transsexuels) qui continuent à réclamer notamment l’avortement comme un droit universel et la prise en compte des théories du Gender dans l’éducation des enfants, notamment à l’école. Ils insistent maintenant sur la nécessité d’inscrire dans la Charte des droits fondamentaux, seconde partie du mini-traité européen, le droit pour les enfants de recevoir une éducation à la sexualité, hors du cadre familial, donc « exacte » et « impartiale ».
Avec la ratification du Traité de Lisbonne par les 27 pays membres, la Charte des droits fondamentaux deviendra contraignante pour tous les états. Il faut donc être très vigilant.
Face à ces intervenants radicaux, les deux autres experts ont tenu un discours courageux et ont d’ailleurs été longuement applaudis :
Jana Tutkova, jeune tchèque, directrice du Centre pour la réforme bioéthique, traita de « liberté et qualité des choix des services de santé reproductive dans l’UE et dans le monde ».
Elle expose les inconvénients d’un système trop étatisé et déresponsabilisant. Elle met en avant les avantages d’une éducation au don et à l’engagement par rapport à la primauté de la satisfaction des désirs égoïstes. Elle dénonce l’agressivité des messages sexuels dans notre environnement. Cette jeune femme qui a vécu l’époque communiste voit un retour au totalitarisme dans cette guerre implicite contre la fertilité des femmes.
C’est une violence qui se cache derrière l’alibi d’une rébellion de la femme contre l’homme. Quelle issue à tout ceci sinon une société stérile, asexuée, capricieuse et dépressive ?
Le dernier expert intervenant, Douglas A Sylva, chercheur à l’institut américain C-Fam démontra dans son exposé « santé et droits reproductifs en droit international » que, dans ce domaine précis, bien souvent « assertion fait loi » ce qui est un abus. Par exemple, le « United Nations Population Fund » assure que « la communauté internationale reconnaît que le choix en matière de reproduction est un droit humain de base ». Mais, nulle part dans les traités et conventions internationales ne figure une telle loi. Et pourtant, un nouveau droit est né et sera revendiqué ! Cette stratégie vise à conquérir par un moyen détourné ce qui n’a pas été obtenu à l’origine. Il est donc important de différencier ce qui relève de la souveraineté des états et ce qui relève du droit international et de discerner ce qui est contraignant de ce qui ne l’est pas.
Le nombre important d’ONG pro-vie et pro-famille dans la salle permit aux députés présents, en particulier à ceux des pays d’Europe de l’Est d’avoir le courage de prendre la parole pour soutenir ces positions par des professions de foi en la vie et la famille qui ne sont pas fréquentes dans cet hémicycle !
Un député médecin polonais nous a même rappelé les pressions exercées pendant les conférences de l’ONU et les chantages à l’aide économique (entrée de la Pologne dans la CEE, en Afrique construction d’hôpitaux contre accès à l’avortement …).
Un autre député a même fait le lien entre la situation actuelle qui dénie à certains le droit d’exister et les génocides dans une période récente de l’histoire.
Les échanges vifs de cette journée montrent que le consensus sur ces questions n’existe pas et n’a jamais existé, malgré les assertions qui veulent nous faire croire qu’aucune évolution positive respectueuse de la vie et de la famille n’est possible. Il y a eu et il y aura toujours une possibilité de faire jouer la clause de conscience, d’exercer sa liberté de parole et de dire non.
Dans sa conclusion, Mme Zaborska a donc fermement insisté sur le fait que la Commission européenne n’était pas qualifiée pour trancher sur la question de l’avortement, ce qui est encourageant.
Prenons conscience que cette conclusion n’a été possible que grâce à la participation massive d’associations pro-vie et pro-famille dont Femina Europa.
Cette journée nous a confirmé l’efficacité du lobbying de NWFE, réseau reconnu par l’ensemble des acteurs de la vie politique de Bruxelles.
Nous avons de nouveau mesuré l’influence des ONG et l’importance du lobbying direct. Nous souhaitons vivement que le nombre des participants français augmente car nos députés ont besoin d’être encouragés.
Une remarque pour terminer : la question de la santé des femmes dans l’Union européenne, ne se limite pas au concept de « santé et droits sexuels et reproductifs » et c’est dommage de voir ce débat revenir périodiquement occulter tous les autres aspects du sujet et monopoliser une grosse part des budgets. Où est le progrès ? Les femmes attendent une vraie politique d’aide au travail à temps partiel, à la conciliation vie familiale et professionnelle, de soutien aux victimes des conflits et des réseaux de prostitution, à l’éradication des causes de la pauvreté, des maladies comme le paludisme en Afrique et l’accès des petites filles à l’éducation.
* SANTE ET DROITS SEXUELS ET REPRODUCTIFS. La definition en est donnée dans le document « Platform of action » de la Conférence du Caire : “a state of complete physical, mental and social well-being and not merely the absence of disease or infirmity, in all matters relating to the reproductive system and to its functionsand processes. Reproductive health therefore implies that people are able to have a satisfying and safe sex life and that they have the capability to reproduce and the freedom to decide if, when and how often to do so”.